On peut dire bien des choses, positives ou plus critiques, sur les Jeux Olympiques d’hiver comme d’été (fête de la jeunesse, rencontre des peuples, effervescence patriotique, marchandisation du sport, etc.). Ce n’est pas l’objet de ce carnet et la simplicité volontaire, en tant que telle, n’est à priori ni pour ni contre les JO. Et pour que les choses soient claires, je ne cache pas mon intérêt réel pour le sport en général, et pour le sport olympique en particulier.
Les JO de Vancouver qui se terminent m’interpellent pourtant comme simplicitaire. Qu’est-ce que la simplicité volontaire peut nous dire d’utile sur cette compétition féroce, même quand elle est amicale, pour les trois fameuses médailles du podium? La simplicité volontaire serait-elle réfractaire à l’effort pour l’excellence? Allergique à toute concurrence ou compétition? Opposée à la promotion d’une mentalité de « gagnantEs » comme celle que défendait l’ex-champion patineur sur courte piste, Marc Gagnon, dans un texte intéressant publié dans La Presse du samedi 27 février ?
Je dirais « non et oui ». La simplicité volontaire ne peut s’opposer à l’effort, puisque pratiquer la simplicité volontaire en demande, surtout dans une société qui pousse tant dans la direction opposée. Tout comme elle ne peut être contre l’excellence, comme tout ce qui tend à améliorer une situation : la simplicité volontaire n’est-elle pas elle-même un patient et persévérant cheminement vers plus et mieux, plus de bonheur, plus de liens, plus d’essentiel, pour un résultat toujours meilleur, pour soi et pour les autres?
C’est d’ailleurs précisément là que la simplicité volontaire s’éloigne des JO tels qu’ils sont actuellement pratiqués : l’accent principal mis sur les champions et les trois premières places, la commercialisation des médailles, les exigences financières des performances, l’importance de gagner plutôt que de participer sont autant de caractéristiques olympiques qui vont à l’encontre de l’esprit de la simplicité volontaire.
La simplicité volontaire favorise la communauté, l’intérêt collectif, plutôt que l’individualisme ou le « chacun pour soi », la coopération plutôt que la compétition. En ce sens, la simplicité volontaire ne peut que se réjouir de l’enthousiasme collectif que peuvent susciter de grandes manifestations sportives ou culturelles comme les JO, les rencontres qu’elles favorisent, l’accueil qu’elles font aux participantEs de partout, quelles que soient leurs provenances ou leurs performances. Mais la simplicité volontaire ne peut que questionner l’emphase démesurée qui est mise sur les résultats et sur le tableau des médailles.
Certes, il ne faut jamais encourager la médiocrité, se contenter de n’importe quoi, tolérer l’absence d’effort pour donner le meilleur de soi-même. Mais là est le nœud central qui différencie la simplicité volontaire et les JO actuels : « donner le meilleur de soi-même », oui, toujours; mais cela n’équivaut aucunement à « être le ou la meilleurE ».
La simplicité volontaire n’est pas hostile au progrès, à l’amélioration, à la tension vers l’excellence, de chaque individu comme des collectivités. Mais elle s’oppose au progrès ou à la tension vers l’excellence quand ceux-ci deviennent des idoles, qu’ils se réalisent au profit de quelques uns et au détriment du plus grand nombre.
Marc Gagnon, dans son texte, écrit que « la générosité, la compassion et l’entraide » qui font la réputation enviable du peuple canadien se révèlent nuisibles en sport et font de nous « des athlètes participatifs plutôt que compétitifs ». Pour lui, « un gagnant est un mauvais perdant. Il vit avec la défaite, mais ne l’aime pas. Il y a une grande différence entre vivre avec la défaite et l’accepter ». Si tel est bien le cas, je crois qu’il faut nettement privilégier les qualités humaines collectives et sacrifier les médailles, celles des individus comme celles du pays. Il restera toujours suffisamment de moments inoubliables, dans la victoire comme dans les défaites, et d’exemples édifiants de travail et de dépassement pour nos jeunes générations pour justifier pleinement la poursuite des JO et notre participation à ceux-ci.