Rapidement, cette semaine, j’aimerais partager avec vous trois lectures récentes qui, chacune à sa façon, aborde des aspects de la simplicité volontaire ou pose questions et défis à ce sujet.
D’abord Routes et déroutes, Pour un meilleur bilan routier au Québec de Jean-Marie De Koninck (Éditions Voix parallèles, Montréal, 2010, 142 p.). Il est indiscutable que l’automobile est, partout en Occident, un des principaux symboles de la liberté individuelle, de la consommation marchande et des menaces écologiques. Elle est aussi, pour de nombreux simplicitaires, une clé importante de changement des perspectives et certainement l’une des sources très importantes d’économies possibles.
En ce sens, mieux connaître la « bête » est certainement très utile, quelle que soit notre attitude personnelle face à celle-ci. Le livre de M. De Koninck est, à cet égard, une contribution précieuse : très pédagogique, facile d’accès, plein de renseignements méconnus, il permet de resituer l’automobile dans son véritable contexte qui est celui de la mobilité humaine. Écrit clairement dans une perspective de sensibilisation pour une meilleure sécurité routière (l’auteur est une autorité en la matière au Québec, en plus d’avoir fondé l’ « Opération Nez Rouge », un service d’accompagnement bénévole des conducteurs ayant bu de l’alcool durant la période des Fêtes), le livre est une véritable invitation à redécouvrir l’automobile comme l’outil de déplacement et de transport qu’elle n’aurait jamais dû cesser d’être. De l’histoire de l’automobile à l’avenir de celle-ci, en passant par nos comportements routiers, les apports de la science et les exigences de l’écologie pour de nouvelles solutions de transport, Routes et déroutes mérite le détour!
Ensuite, Habiter seul : un nouveau mode de vie, sous la direction de Johanne Charbonneau, Annick Germain et Marc Molgat (Presses de l’Université Laval, Québec, 2009, 269 p.). Cette étude universitaire, pilotée par l’Institut national de la recherche scientifique, documente l’évolution des modes d’habitation vers une individualisation (qui n’est pas nécessairement synonyme d’individualisme) croissante, à l’image de la plupart des autres dimensions de notre société moderne.
Divisé en trois parties, l’ouvrage porte sur « les ménages composés d’une seule personne : d’abord une question de logement et de trajectoire résidentielle » et « la vie sociale des personnes qui habitent seules »; pour enfin proposer une réflexion sur la question suivante : habiter seul est-il en train de devenir un mode de vie?
Ce phénomène en forte croissance (passé de 20% des ménages canadiens en 1981 à 27% en 2006; le nombre des « ménages solo » augmente de 15 à 18% tous les cinq ans depuis quelques décennies, selon Statistiques Canada) pose de sérieux défis sinon à la simplicité volontaire comme telle, du moins en ce qui concerne l’empreinte écologique que nous imposons à la planète. Car vivre seul multiplie automatiquement par deux (et plus, si on tient compte des familles potentielles) à peu près tous les besoins de base à satisfaire (espace résidentiel, ameublement, chauffage, etc.). Sans compter que la simplicité volontaire, si elle peut être un choix individuel, ne se vit bien qu’en rapport avec les autres et comporte intrinsèquement une dimension collective (mise en commun des ressources, échanges et partages, déplacement de l’accent mis sur les biens vers l’accent mis sur les liens, etc.).
Et finalement Manuel de transition, De la dépendance au pétrole à la résilience locale, de Rob Hopkins (Éditions Écosociété, Montréal, 2010, 212 p.). Ce livre, qui vient tout juste de sortir en librairie, est une véritable mine! Dans les deux sens du terme. Mine artisanale, capable de faire exploser vos idées reçues, vos habitudes bien ancrées, votre sentiment de désabusement ou d’impuissance. Et mine d’or, recelant des richesses et des ressources insoupçonnées mais infiniment précieuses.
Écrit par le fondateur du mouvement « Villes en transition », ce guide pratique publié en 2008 est enfin disponible en français et constitue un peu comme la Bible du mouvement. Il part du constat que nos sociétés, fondées essentiellement sur l’utilisation massive des énergies fossiles et particulièrement du pétrole, n’auront d’autre choix que de transformer radicalement leur façon de vivre à mesure que ces énergies vont se raréfier et devenir par conséquent infiniment plus coûteuses, en raison de la demande toujours croissante pour une ressource en diminution. Comment pourra-t-on vivre sans pétrole? C’est précisément le point de départ des initiatives de transition.
Guide pratique on l’a dit (« Handbook » dans le titre original), ce manuel est attrayant graphiquement, largement illustré dans tous les sens du terme (photographies, dessins, tableaux, encadrés, mais surtout une douzaine d’outils concrets proposés pour passer à l’action) et mobilisateur sans le discours moralisateur. La première partie, intitulée « La tête », comporte quatre chapitres autour du thème « pourquoi le pic pétrolier et le changement climatique signifient qu’il est inévitable de faire petit ». La seconde partie, « Le cœur », comporte cinq chapitres et examine « pourquoi il est déterminant d’avoir une vision positive ». Et la dernière partie, « Les mains », consacre quatre chapitres à « passer des idées à l’action, c’est-à-dire à explorer le modèle de Transition pour inspirer une résilience locale de reconstruction ».
Pour les simplicitaires et les gens intéressés par la simplicité volontaire, il s’agit d’un outil particulièrement intéressant puisqu’il resitue plusieurs des intuitions et des pratiques individuelles des simplicitaires dans le contexte plus global et collectif, mais tout aussi concret et pratique, du concept et des équipes locales de transition. Une façon stimulante de relancer la simplicité volontaire à une autre échelle, plus nécessaire et urgente que jamais.
Bonnes lectures!