Le compostage: quel programme faut-il développer?

ComposteursIl existe deux programmes québécois d’aide au compostage. De loin le plus important, le Programme de Traitement des Matières Organiques par Biométhanisation et Compostage (PTMOBC) a un budget de 650M$. Le Programme d’Aide au Compostage Domestique et Communautaire (PACDC), pour sa part, bénéficie d’une enveloppe de 2M$.

Les montants alloués  à chacun démontrent que la priorité est nettement accordée à ce que je qualifierai  ici de « compostage municipal », c’est-à-dire une approche impliquant la collecte porte-à-porte de la matière organique et sa biométhanisation et/ou compostage dans des installations de type industriel. Le compostage domestique, quant à lui, se fait dans les arrière-cours des demeures, dans des composteurs domestiques. Le PTMOBC s’applique de façon très générale dans les villes au Québec alors que le PACDC ne s’intéresse qu’aux municipalités de petite taille, les municipalités dévitalisées, les MRC pour leurs territoires non organisés et les communautés autochtones.

Nous proposons, ci-après, d’inverser les priorités et de mettre l’accent sur le compostage domestique par rapport au compostage municipal, partout où c’est possible.

 

Les deux types de compostage ont certaines choses en commun

En effet, quelque soit le type de compostage choisi, sa mise sur pied nécessite d’abord que les citoyens fassent le tri des déchets de cuisine et les accumulent dans un petit bac sur ou sous le comptoir. Les deux types de compostage ont aussi en commun d’avoir recours à un grand bac extérieur soit un composteur domestique ou un bac roulant.

 

Les deux types de compostage présentent aussi certaines différences

Compostage domestique Compostage municipal
– Trouver une place dans la cour pour le composteur domestique. – Trouver une place dans l’entrée pour un troisième bac roulant.
– Accumuler la matière dans le composteur et alterner la matière brune (feuilles) et la verte (résidus alimentaires), puis retourner au besoin. – Accumuler la matière dans le bac roulant et le mettre à la rue régulièrement la bonne journée.- Nettoyer et laver le bac de temps en temps afin de prévenir odeurs, mouches et vers blancs en été et  formation de blocs gelés en hiver.
 – N’accepte pas les viandes, poissons et produits laitiers. – Accepte une plus grande gamme de matière organique, quoique les quantités additionnelles soient faibles.
– Aucune collecte et/ou transport- La décomposition de la matière se faisant en milieu aérobie (en présence d’oxygène) il n’y a pas de production de GES – Collecte porte-à-porte fréquente, surtout en été, même si les quantités sont très faibles, soit de l’ordre de 1 kg/ unité d’habitation/ collecte (explications ci-après).- Les camions produisent des gaz à effet de serre (GES) et du bruit en plus d’être un coût important et récurrent.
– Aucune installation industrielle requise. – Construction et opération coûteuses d’usines de   biométhanisation et/ou de compostage.
– Production de compost à domicile et utilisation sur place. – Production et récupération possible de biogaz, digesta, et compost difficiles à commercialiser de façon rentable.

Explications : La quantité de matière organique produite à domicile représente 44% du poids total des déchets et est donc importante. Toutefois, les résidus verts (feuilles, gazon, résidus de jardin, etc.) représentant 75% de cette matière, laquelle continuera à faire l’objet de collectes spéciales à l’automne et au printemps, et ce, malgré la mise en place de la collecte porte-à-porte des résidus alimentaires. Cette dernière collecte est difficilement justifiable quand on réalise que la quantité de matière provenant de la cuisine (16%) ne représente que 1kg/unité d’habitation/collecte. Réf. « Bilan 2012 de la gestion des matières organiques au Québec » Recyc-Québec, 2014.

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La comparaison du compostage domestique et municipal démontre que ceux-ci nécessitent une gestion assez comparable à domicile. La différence majeure réside en ce que l’approche municipale exige une collecte porte-à-porte, impliquant des camions avec leurs nuisances, et le traitement industriel de la matière, le tout à coûts très élevés.

Le compostage domestique étant plus avantageux sur les plans économique et environnemental, il devrait donc être adopté partout dans les banlieues et milieux ruraux où dominent les maisons unifamiliales. Le compostage municipal, pour sa part, demeure intéressant pour desservir les parties densément peuplées des villes et les multi-logements, qui sont problématiques pour la pratique du compostage. Dans ces contextes difficiles, on pourrait faire appel à ce que je qualifierais de « cocktail compostage ». Celui-ci pourrait mettre en action les différentes approches possibles : le compostage domestique, municipal, communautaire et le vermicompostage, en tenant compte des différents milieux physiques et humains en présence.

 

La pratique du compostage au Québec

La pratique du compostage au Québec devrait être facilitée par la remise gratuite d’un récupérateur de cuisine et d’un composteur domestique ou d’un bac roulant pour chaque unité d’habitation. De plus, il faut offrir des conditions facilitant le compostage domestique en présentant des séances de formation et, ce qui est novateur, accorder un dégrèvement fiscal d’environ 50$/par unité d’habitation/an pour ceux qui pratiquent le compostage à la maison.

Plutôt que d’opter pour une approche très technologique et coûteuse, nous proposons un choix simple et économique, par une participation individuelle renforcée, en généralisant le compostage domestique. Plusieurs avancées écologiques récentes au Québec ont fait appel, avec succès, à une grande participation individuelle, soit le recyclage, l’adoption des sacs de magasinage réutilisables, les barils récupérateurs d’eau de pluie, la finance socialement responsable, etc.

Une option préférentielle pour le compostage domestique permettrait de réduire, de façon très importante, les sommes prévues au PTMOBC (compostage municipal). Selon une personne bien informée au Ministère du Développement Durable de l’Environnement et de la Lutte aux Changements Climatiques, le coût total de l’approche municipale drainerait 1,3G$ provenant des trois niveaux de gouvernements.

Et puisque le coût global de « l’opération compostage au Québec » serait beaucoup moindre avec une approche domestique, cela permettrait de réorienter certains montants vers des actions environnementales plus utiles, et d’aider le gouvernement, dans le cadre de la révision des programmes, à équilibrer son budget.

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