Ce que je vois autour de moi me pousse à me regarder vivre, à me remettre en question et à demeurer le plus possible dans la simplicité et l’essentiel pour répondre à mes besoins. Je voulais vous faire part d’un constat qui m’inquiète, sans toutefois généraliser.
Nous faisons livrer à domicile nos repas (diètes et équilibrés) par un traiteur, nous avons une femme de ménage, une couturière pour faire un bord de pantalon et recoudre un bouton. Nous payons une décoratrice pour décider de notre décor, de la couleur des murs au choix des meubles, rideaux et accessoires. Une manucure s’occupe de nos ongles et une esthéticienne de notre visage…
Sommes-nous devenus des handicapés de l’autonomie personnelle?
La science et la technologie nous ont expulsés de nos propres vies en nous convainquant ‘’qu’ils sont les experts’’ et que notre vie dépend d’eux, surtout en ce qui concerne la médecine et notre santé. Nous ne connaissons plus notre corps et allons à l’urgence pour un simple rhume.
L’image qui nous est proposée sur tous les plans c’est : ‘’la perfection apporte le bonheur’’. Chaque malaise et chaque besoin (réel ou créé par la société) a sa solution toute prête à utiliser afin que notre vie soit parfaite et notre bonheur assuré sans délai.
Ce qui ne s’utilise pas s’atrophie et se perd éventuellement, même les facultés de notre cerveau. Sommes-nous en train de perdre notre savoir et notre capacité à répondre à nos besoins de base, à prendre soin de nous et de notre environnement?
Tous ces services spécialisés coûtent cher. Que ferons-nous en cas de baisse ou de perte de revenu ou avec un revenu de retraite? Qui s’occupera de nous, comme une bonne maman envers son enfant, si nous n’avons plus les moyens financiers de nous payer tous ces services, et que nous n’avons pas appris ou avons oublié comment préparer un repas équilibré, faire l’épicerie, faire le ménage, recoudre un bouton, soigner un rhume?
On ne fait même plus d’efforts pour rencontrer l’âme sœur, des agences de rencontres virtuelles s’en occupent. Nous n’avons qu’à y inscrire notre ‘’liste d’épicerie’’ (grand, bien bâti, riche, intelligent, …). Nous n’avons même plus besoin d’entretenir le désir pour notre partenaire, une petite pilule s’occupe de faire fonctionner sur commande la machine qu’est devenu notre corps.
Pendant ce temps, le taux de dépression augmente, les adultes sont sur le prozac et de plus en plus d’enfants sont sur le ritalin! Si on considère que l’estime de soi se construit à partir de nos réussites et de notre capacité à prendre soin de nous-même, nous ne sommes pas loin de penser que notre façon de vivre nous rend malade.
Est-ce qu’un jour viendra où nous serons tous devenus comme des orphelins immatures incapables de prendre soin de nous? Sans vouloir revenir au siècle dernier, nous exagérons peut-être sur l’ampleur de la délégation à d’autres en ce qui concerne la satisfaction de nos besoins fondamentaux.
Avant que tout ce savoir-être et savoir-faire ne se perde, nous pourrions peut-être ralentir un peu, simplifier un peu notre vie et prendre le temps de répondre nous-mêmes à nos besoins et transmettre ce savoir à nos enfants car ce seront probablement eux les orphelins qui ne sauront pas répondre à leurs besoins. Ce serait un pauvre héritage à laisser aux suivants!
Prenons plaisir à faire des choses soi-même ; ça fait du bien à notre ego et à notre porte-feuille aussi. Très beau texte !
Vous savez que c’est grâce à vous qu’il y a 12 ans, j’ai pris des cours de couture ? Oui, vous m’avez ouvert les yeux.
Je fais le bilan depuis 12 ans : je fais environ 70 % de mes vêtements moi-même, je tricote, je cuisine quasiment tout ce que nous consommons, le tout en travaillant.
Le temps, je l’ai organisé différemment. Je suis plutôt lève-tôt, et du coup, j’ai plus de moments calmes pour faire les choses. S’il m’arrive de regarder un bon film ou un documentaire intéressant, j’ai un tricot dans les mains en même temps.
La lecture a toujours été très présente au foyer, mais elle l’est encore plus désormais.
Un choix de vie a également été fait. Nous avons déménagé en centre ville afin de pouvoir aller à pied au travail. La voiture ? pour l’instant nous en avons gardé une en cas d’urgence, mais lorsqu’elle sera très fatiguée, nous adhérerons à une entreprise d’éco-partage de voiture.
Pour le “système” qui veut que l’on délègue à la société (enfin à des entreprises mercantiles) tout et n’importe quoi, je précise que depuis 9 ans, nous avons organisé le quotidien autour d’une personne âgée atteinte de la maladie d’Alzheimer. Et pourtant,on nous avait prédit que c’était pas possible, difficile …. Et pourtant, nous n’avons pas le sentiment de vivre moins qu’avant loin de là. Et mon expérience prouve que c’est possible.
Il faut nous réapproprier nos vies que nous avons délégué à d’autres. Il faut que l’incitation est très forte de la part de cette société mercantile. La résistance “douce” s’impose si on en a envie. Ne pas croire que ce n’est pas possible. Essayer, c’est parfois l’adopter.
Malgré le fait que tout ça soit vrai, le vrai problème est que nous passons tellement de temps à travailler que nous n’avaons plus de temps pour rien d’autre. J’avais commencé à prendre des cours de couture que j’adore d’ailleurs, mais j’ai dû arrêter par manque de temps…
Tout ce que je dis, c’est que tous les problèmes sont engendrés un moment donné par un autre problème. Si je n’avais pas besoin d’argent, je ne travaillerais pas toutes mes journées, je n’aurais pas besoin de faire 45 minutes de route matin et soir mais j’ai besoin d’argent parce qu’aujourd’hui, même en faisant tout soit même, le loyer et les frais de déplacements (une voiture) coutent très chers… Je ne vois pas comment je pourrais faire.
Peut-être trouverai-je un jour un équilibre à tout ça!
Effectivement les compagnies pharmaceutiques feraient moins d’argent sur notre dos si on reprenait le temps de vivre, de créer, de travailler de nos mains. Les enfants s’en porteraient mieux également ayant le temps de découvrir les bonheurs simples de la vie. Ils sont, quant à moi, les plus satisfaisants ! Merci pour ce texte.
Comme je suis d’accord avec vous! Aux États-Unis, on dit que bien des enfants n’ont jamais vu leurs parents cuisiner. J’imagine que nous n’en sommes pas loin… Mon frère, un touche-à-tout très habile, a l’habitude de répondre, lorsque nous le félicitons pour une réparation ou un bricolage en dehors de ses cordes: “C’est fait par du monde!”. Donc, comme c’est fait par du monde, il est capable, lui aussi, de le faire.
En fait, nous nous laissons leurrer par l’illusion d’efficacité que cette délégation nous donne. Mais trouver un endroit où on répare un truc, aller porter le truc à réparer, aller rechercher le truc à réparer, c’est très souvent PLUS long que de tâtonner un peu pour le réparer nous-mêmes. Mais, quand c’est fait par un spécialiste, c’est supposé être mieux. Alors moi je me dis: “C’est sûr, que si je faisais paysager mon jardin, repeindre un mur ou cuisiner un plat par un spécialiste, il serait parfait. Mais moi, j’y ajoute du coeur parce que c’est MA maison, mon jardin, mon monde à nourrir…”
Et le coeur, y’a juste moi qui est capable de le donner!
C’est évidemment un constat un peu déprimant mais très vrai…
Lorsque je dis que je fais mon pain, mes yaourts et que je n’ai pas besoin de machine pour ça, les gens tombent des nues comme si je détenais un savoir extraordinaire (s’ils savaient à quel point c’est simple !!).
Quand je répète la maxime de ma grand-mère pour les rhumes (un rhume soigné par le médecin, ça dure 1 semaine, un rhume soigné par la mémé, ça dure 7 jours), ils me trouvent dangereuse…
Merci pour ce billet qui remet les pendules à l’heure (^_^).
WOW WOW WOW !!!! J’adore cet article! Merci de lire dans mes pensées!!! Nous dépendons d’un “système” et nous n’arrivons plus à penser pour nous même…