J’ai souvent écrit que la simplicité volontaire était une sorte de philosophie de vie, un éclairage qui pouvait mettre en lumière, sous un autre jour, n’importe quelle réalité de la vie individuelle et collective. En voici quelques exemples.
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Dans un article à la « une » du Devoir du samedi-dimanche 21 et 22 mai, Louis-Gilles Francoeur faisait écho à la pensée de Jean-Marc Jancovici, spécialiste français des questions de changement climatique et d’énergie, et plaidait pour une augmentation significative, immédiate, graduelle et planifiée du prix du pétrole. Il montrait que cette augmentation (d’au moins 50% sur quelques années), imposée par le gouvernement lui-même par une taxation sur le carbone, aurait trois avantages principaux :
- générer de très importants revenus pour l’État et ses programmes sociaux;
- provoquer une baisse de la consommation d’essence et donc des gaz à effet de serre;
- et faire cette transition de manière ordonnée et prévisible.
Tandis que si les gouvernements laissent faire la logique du marché, le prix du pétrole va augmenter tout autant, avec la même conséquence de baisse de la consommation d’essence, mais avec deux inconvénients majeurs :
- cette hausse va se faire de façon chaotique en fonction des fluctuations du marché et de la spéculation (avec les conséquences sociales que cela entraîne)
- et surtout, les profits iront dans les poches des pétrolières au lieu des coffres de l’État.
Avec la conséquence que les citoyenNEs paieront deux fois au lieu d’une : une fois pour les pétrolières et une autre fois pour les revenus additionnels dont l’État aura de toutes façons besoin (et qu’il aurait pu générer grâce aux taxes sur le carbone).
Un article extrêmement éclairant et qui montre, une fois de plus, comment seule une vision et un leadership politiques peuvent nous permettre de relever adéquatement, dans l’intérêt collectif, les défis de notre époque. À l’opposé complet des politiques conservatrices qui consistent à s’en remettre de plus en plus au privé et aux forces du marché. Quand donc oserons-nous réclamer ouvertement cette augmentation planifiée des prix de l’essence?
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Tout le monde parle de surconsommation. C’est devenu un lieu commun. Et surtout, une réalité tellement répandue qu’on ne la remarque même plus : c’est la nouvelle « normalité ». Et ça prend des artistes pour nous la rendre à nouveau perceptible, remarquable, et nous interpeller.
Je vous suggère de faire défiler lentement What’s_it_Made_Of (pps), en vous laissant happer par la beauté de ces « œuvres d’art » élaborées patiemment à même nos excès par des humains qui n’ont pas perdu la capacité de voir le réel tel qu’il est, mais aussi tel qu’il pourrait être.
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Mardi, 31 mai 2011 : le Centre international de recherche sur le cancer de l’Organisation mondiale pour la santé (OMS) tranche finalement le débat. L’utilisation du téléphone cellulaire (et des autres formes de micro-ondes) peut être cancérigène pour l’humain.
Certes, il faudra poursuivre les études. Les conséquences exactes de l’utilisation des cellulaires ne pourront pas être connues avec certitude avant plusieurs années (l’usage massif de ceux-ci étant encore trop récent). Mais il y a là, une fois de plus, l’illustration déjà notée de « l’effet rebond » : la technologie permet des « progrès » dans tous les domaines, mais s’accompagne presque toujours d’effets imprévus ou non recherchés qui annulent souvent les « avancées » permises par cette technologie (avantages et inconvénients du nucléaire, des automobiles moins énergivores qui permettent de plus longues distances, des ordinateurs qui devaient permettre d’économiser le papier et qui en consomment au contraire davantage, tout comme ils devaient nous permettre de « sauver du temps » et qui ont fini par nous « scotcher » à notre écran, etc.).
Cette constatation n’a aucunement pour but de dénigrer la recherche ou les découvertes technologiques. Mais de nous rappeler que les « progrès » ont leur prix, qui n’en valent pas toujours la peine. Et surtout, qu’il ne faut jamais perdre de vue l’objectif recherché pour ne pas se laisser leurrer par la poudre aux yeux des apparences, de la modernité et des… profits!
Les téléphones cellulaires ont des avantages et ont rendu possibles de nombreux services jusqu’ici inaccessibles. Mais ils sont aussi (et surtout?) devenus des symboles parfaits de la surconsommation, du gaspillage des ressources et de l’illusion communicative. L’industrie des cellulaires s’en porte merveilleusement bien. Mais il n’est pas sûr que la société puisse en dire autant!
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Dimanche prochain le 12 juin, Montréal célébrera son Grand Prix de la Formule 1. Des retombées économiques de près de 100 millions de dollars : pas question de « cracher dans la soupe »! Mais à partir de quel prix sommes-nous prêts à « vendre notre âme »?
Car il est indiscutable que cet événement « sportif » est une aberration écologique : bruit, pollution, gaspillage de pétrole, culte de la vitesse, performance à n’importe quel prix. Et même les « avantages » que ces compétitions ont déjà prétendu apporter aux automobilistes (on y expérimentait des innovations qui pouvaient ensuite profiter à la motorisation grand public) n’existent plus, aux dires des spécialistes automobiles. Car les nouveaux outils de mobilité dont nous avons besoin n’ont plus rien à voir avec les bolides qu’on fait tourner en rond devant des dizaines de milliers de buveurs de bière.
Au fond, un Grand Prix de Formule 1 est une grand-messe vouée au culte des idoles que sont l’auto, la vitesse et le fric! L’antithèse complète de la simplicité volontaire, à tous les points de vue.
Déjà, depuis quelques années, les objecteurs de croissance français avaient appelé au boycott du Grand Prix de France. C’est maintenant au tour de leurs cousins du Mouvement québécois pour une décroissance conviviale d’oser une parole discordante en cette Semaine du Grand Prix de Montréal. Mardi prochain, le 7 juin, le MQDC et ses supporters publieront une annonce dénonçant cette manifestation sportive et déclarant que, contrairement aux affirmations des chantres de la croissance économique, « le Grand Prix de Formule 1 n’est pas bénéfique pour les MontréalaisES et les QuébécoisES ». Et le dimanche 12 juin, jour du Grand Prix, ils se rassembleront à 12h30 devant la statue de Félix Leclerc, dans le parc Lafontaine, pour joyeusement « dessouffler la grosse balloune du Grand Prix »! Ce serait bien si tous ceux et celles qui n’aiment pas le Grand Prix s’y retrouvaient pour fêter!
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Un membre du RQSV, Jacques Fournier, vient de publier une très intéressante réflexion sur la « retraite citoyenne » : voilà une façon renouvelée, aussi heureuse mais beaucoup plus socialement constructive, d’envisager les années de plus en plus longues et en santé que l’on consacre à cette étape de vie si longtemps désirée. Je vous en conseille la lecture…
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Et finalement, je copie ici la réponse que je viens de faire au récent commentaire de Gilles sur mon billet du 6 mai sur « Existe-t-il un mouvement de la simplicité volontaire? ». Car la distinction entre « mouvement » et « organisation » de la simplicité volontaire est toujours aussi pertinente, et peut nous aider au moment où une douzaine de simplicitaires enthousiastes travaillent à « relancer » le Réseau québécois pour la simplicité volontaire, la principale organisation de simplicitaires au Québec.
La question de qui fait partie du mouvement de la simplicité volontaire ou pas est très intéressante. J’en ai déjà parlé, notamment le 23 avril 2010 dans mon billet sur les simplicitaires anonymes.
Si le mouvement de la simplicité volontaire est une espèce de courant social ou de tendance observée par de nombreux individus cherchant à vivre plus simplement, alors TOUS ceux qui pratiquent la simplicité volontaire d’une manière ou d’une autre en font AUTOMATIQUEMENT partie, qu’ils le veuillent ou non, qu’ils en soient conscients ou non, puisqu’il s’agit d’une caractéristique de société qui est constatée après coup, par les journalistes, sociologues ou autres chercheurs qui analysent les comportements sociaux.
Par contre, si le mouvement pour la simplicité volontaire signifie une organisation quelconque (comme le Réseau québécois pour la simplicité volontaire ou n’importe quel autre groupe précis, local, régional, national ou international), alors là se pose la question que Gilles aborde dans son commentaire : qui est admis dans ces groupes (chacun ayant ses propres règles d’adhésion et de fonctionnement).
Et dans ce contexte de membership précis, NON il n’est pas du tout nécessaire de faire partie d’une organisation de simplicité volontaire pour la pratiquer. La simplicité volontaire est offerte à chacunE, en toute liberté et gratuité, et chacunE à son niveau et à sa manière.
Mais une (ou des) organisation(s) de simplicité volontaire sont utiles et nécessaires pour faire la promotion active d’un tel mode de vie, tant individuellement que collectivement. Et de telles organisations sont aussi essentielles pour faire un travail culturel (c’est-à-dire travailler à faire évoluer les mentalités sociales) et politique (travailler à faire avancer les priorités et les choix collectifs favorisant la pratique individuelle de la simplicité volontaire).
D’où l’importance que de nombreux simplicitaires individuels, qui n’ont PAS besoin d’organisation pour l’être, deviennent aussi membres conscients et engagés (chacunE à son niveau et à sa façon) d’organisations qui travaillent ouvertement à l’avancement de cette philosophie de vie.
Bonne semaine!