Comment combler le vide? Cette question vient du Groupe de simplicité volontaire de Trois-Rivières, question à laquelle ses membres auront à répondre très bientôt lors de leur prochaine rencontre régulière. N’ayant pas la possibilité de me rendre à cette rencontre mais ressentant très fortement l’envie de répondre à la question, je me risque ici à ajouter ainsi mon grain de sel à cette belle réflexion…
Comment combler le vide?
Nous avons besoin du vide :
• Entre les repas, nous ne mangeons pas. Histoire de pouvoir ressentir la faim à l’approche du prochain repas, de saliver, d’avoir le goût de se préparer un bon repas. Histoire d’anticiper joyeusement ce repas partagé en famille, avec des ami-es, des camarades. Ou seul.e, face à son âme.
• Manger des bonbons à l’année longue enlève du plaisir à la fête de l’Halloween. Boire du vin, du champagne ou de la bière à tous les repas, c’est moins apprécier leur présence sur la table quand viennent les célébrations : anniversaires, retour de la lumière (Noël), retour du printemps (Pâques).
• Les amoureux savent qu’ils ont besoin de l’absence. S’ennuyer un peu et même beaucoup, avant de se retrouver, le cœur en fête, comme au premier jour.
• Nous avons besoin, dans la vie, de moments « plates », monotones, ordinaires, pour savoir apprécier les moments de fêtes et de célébrations. De « l’ordinaire » pour faire de la place aux festivités « extra-ordinaires ».
Et ainsi, en simplicité volontaire, avons-nous besoin, pour notre plus grand bonheur, de retrouver la frugalité quotidienne. La vie sobre. Ce qui n’empêche pas, à l’occasion, de se permettre certains « abus ». Quand arrivent les Fêtes, par exemple. Le problème, c’est que nous avons multiplié à l’excès le nombre de fêtes à fêter. C’est ce que m’a fait réaliser, un bon jour, un vieux Père de Sainte-Croix qui avait décidé, pour maigrir un peu, de se donner pour règle de ne manger du dessert qu’aux anniversaires. Comme sa communauté comptait plus de 200 personnes, cela faisait déjà plus de 50% des jours où le gâteau d’anniversaire était partagé!
Le problème, c’est qu’on nous propose trop d’occasions de fêter. C’est surtout le Marketing qui nous inculque l’idée qu’il faille fêter le plus souvent possible. Faire en sorte que l’abus devienne quotidien, et que toutes les occasions de la vie deviennent des occasions de libations: Formule Un, Coupe Stanley, Saint-Jean-Baptiste, Fête des Mères, des Pères, des Enfants, des Voisins, des Amoureux, Festival Juste pour Rire, de la Francophonie, de la Poutine, etc. Et le Marketing s’occupe même des périodes de « passage à vide » pour avoir trop fêté : Maisons de jeûne, vente de Tisanes réparatrices, Ateliers pour suer (eh oui), etc. Et c’est pour pouvoir, bien sûr, ramener tout le monde le plus vite possible au party, avec libations, cadeaux, décibels endiablés, vente de T-Shirts (à 10$), Queues de Castor et autres gadgets de consommation.
Le vide est important. C’est la soif qui, dans le désert, donne sa valeur au puits.
Nous avons besoin du silence (vide de paroles). Nous avons besoin de repos (vide d’activités). Nous avons besoin de calme (vide de fébrilité). Nos enfants ont besoin de s’ennuyer avant d’inventer des jeux imaginatifs. C’est la semaine « ordinaire » qui valorise la fin de semaine.
Il y a un vide qu’il faut pourtant combler. « Vous avez tout pour être heureux! » dixit nos parents. Nous avons tous dit à nos enfants: « Va t’amuser! Des jouets, il y en a plein ta chambre! » Nous rêvons tous de gagner la loto. Mais nous savons tous que « L’argent ne fait pas le bonheur.»
C’est quoi le problème? Plus nous avons de biens, plus nous nous isolons parce que nous croyons que nous pouvons enfin nous passer des autres. Voilà. La communauté nous manque. C’est le vide à combler. En simplicité volontaire, il y a ce slogan: « Moins de biens, Plus de liens! ».
• L’enfant qui s’ennuie dans sa chambre pleine de jouets nous dit qu’il veut des amis. Moins de jouets mais plus d’amis.
• Les ménagères au foyer, dans les banlieues d’il y a 30 ans, s’attendaient à vivre le plus parfait bonheur dans leur bungalow entouré de gazon. Dans les faits, elles ont consommé des tonnes de Valium parce qu’elles s’ennuyaient. Aujourd’hui, fort heureusement, elles se donnent des rendez-vous par Internet pour aller faire ensemble ½ heure de marche rapide au Centre d’Achats. Les ménagères de banlieue ne veulent plus se sentir prisonnières d’une cage dorée. Elles aussi, veulent avoir des ami.e.s.
• Dans nos grandes villes comme dans les banlieues et petits villages (partout, en fait!), heureusement qu’il y a des groupes communautaires pour aider tous les citoyens qui ressentent un « vide » (quelle que soit la raison) à se retrouver, à se sentir utiles en y faisant du bénévolat, en sachant qu’ils y sont accueillis, appréciés, qu’ils peuvent autant donner que recevoir. Le bonheur!
Quelle est la meilleure façon de créer plus de liens dans sa communauté? C’est de ne pas posséder TOUT. C’est d’être obligé d’aller chez le voisin emprunter une échelle, un chaudron à ketchup, une tondeuse, une information…
« Moins de biens = Plus de liens! » Et le mauvais « vide » est disparu!
Bonjour!
Je le vois tellement, ce lien entre surconsommation et vide intérieur. Je me suis ramassée sur ce site parce que je n’en peux plus d’en vouloir toujours plus. Toujours plus d’argent, toujours plus de loisirs, toujours plus de plaisir, toujours plus plus plus! Mais la société nous invite tout le temps tellement à ça! Et c’est un cercle vicieux… plus on consomme, plus on est “invités” dans la sphère de consommation, et plus on en veut encore. Comme vous le dites si bien dans votre article, le marketing et très bien su flairer la bonne affaire. Et j’ai tellement l’impression que la vie, c’est pas ça. Je cherche constamment à trouver moyen d’avoir plus d’argent… jamais je ne cherche moyen de créer des liens. Au fond de moi, je trouve ça épouvantable lolll.
J apprécie de lire ce que vous écrivez, j ai pour ma part mis dix ans à comprendre le changement et à m adapter…..et je crée des liens et me détache des biens petit à petit…..c est une joie profonde que de devenir sobre dans la satisfaction de ses besoins….
Ce concept est beau, mais pas dénué de risques. Parce que la “simplicité volontaire” est un rêve des mieux nantis de la terre. Quand tu en arraches, mais là vraiment, pour boucler les fins de mois, je ne crois pas que cette simplicité soit tellement séduisante. Dans ce contexte, avoir un 10$ “de lousse” peut être, et est, une véritable occasion de célébrer ! Parce que Noël et les anniversaires et les vacances annuelles deviennent un rappel de son incapacité de choisir de consommer ou non. On N’a PAS le choix. Et ça, ce manque au goût amer et l’isolement qui s’ensuit, ça se passe ici, et beaucoup plus qu’on ne veut le croire !
Il importe de ne pas retomber dans la louange de la pauvreté. De ne pas associer l’abondance au mal. De ne pas nourrir notre malaise collectif vs l’argent.
Ce n’est pas ce que dit le texte, mais le glissement me semble facile.
Et la pauvreté, la misère, n’est en aucun cas un bien. Les gens qui n’ont pas grand chose ne sont pas plus heureux que les riches : je l’ai souvent observé, je l’ai même vécu, assez pour me prononcer en toute connaissance de cause. Se lever la gorge nouée avec la peur de se retrouver à la rue n’a sans doute rien de réjouissant. Et le vivre tout seul, comme un looser, c’est pire ! Et notre malaise vs l’abondance crée, de la même façon, notre malaise et nos jugements collectifs vs ceux qui n’ont rien, qui ont tout perdu – cette bande de “sans coeur” qui mettent un voile sur notre société “où il fait bon vivre” !
Ne pas avoir l’argent pour payer Hydro, ne pas savoir où trouver l’argent pour le loyer, attendre la prochaine paie pour s’acheter une pinte de lait… ce n’est pas heureux.
Et l’horreur, c’est que, à ce stade, ce sont les liens qui écopent. On ne peut plus inviter un ami à prendre un café – faute de café, de lait, de sucre, de petits biscuits.
Non, l’argent ne fait pas le bonheur – c’est vrai.
Mais entre nous, la misère non plus, ça ne fait pas le bonheur !
Merci pour cet article intitule:”Comment combler le vide”.
Très juste comme réflexion.
S’habituer au silence et au manque nous fait découvrir que nous manquons souvent de rien.
C’est un regard spirituel (sens de la vie) qui manque plutôt à nos sociétés de “va vite” et de plaisirs immédiats.
Nous sommes malheureusement une société de consommation, mais nous sommes encore libres de ne pas y adherer afin de conserver notre profonde joie d’être en lien et vivant.
D’accord avec ce que vous avez écrit, il nous reste le choix, le pouvoir d’être différent, c est une joie profonde et durable…..une sorte d’écologie humaine durable….
Ping : Comment combler le vide